Le banditisme a une forte résonnance dans l’imaginaire contemporain, véhiculé par le cinéma et l’information sensationnelle. Des gangsters de Chicago, à la figure légendaire du Parrain, aux mafias russes et mexicaines d’aujourd’hui, le banditisme exprime aussi l’importance des flux financiers liés à l’économie « informelle » de la drogue dans le monde d’aujourd’hui. Le présent dossier présente plutôt quelques aspects de l’histoire du banditisme au Maroc, souvent lié au phénomène des coupeurs de routes (qutt’ at-turuq). La majorité des contributions abordent le banditisme au cours des époques qui ont précédé la domination coloniale du XXe siècle. Le phénomène apparaît dans les milieux des campagnes et des villes. Il est appréhendé à partir de différentes perspectives : chronique dynastique, coutume locale et droit musulman, et récits de voyage européens. Une impression d’ensemble se dégage de ces articles, c’est qu’il est difficile de réduire le banditisme à l’acte de transgression de la loi commis par des déviants. Nous découvrons des spécificités culturelles et une plus grande complexité dans les rapports entre la production de la violence, les enjeux sociaux et le pouvoir étatique.
Dans des circonstances normales, un bandit n’écrit pas : il opère et laisse aux autres le soin de célébrer ou de dénigrer ses hauts faits. De ce fait, il est relativement rare qu’on ait directement accès à ce que ressent ou pense un bandit ou comment il se conçoit. C’est pourquoi la seule approche de la réalité du phénomène du banditisme ne se fait le plus souvent qu’à travers un cheminement extérieur. Ce sont les autres qui en parlent. Ceci devrait nous inciter à beaucoup de précaution lorsque nous entreprenons une réflexion sur ce phénomène. Encore qu’en l’absence d’autres ressources, l’on est bien astreint à avoir recours à la documentation disponible, toute externe qu’elle soit. L’on notera que les écrits qui se sont intéressés à l’activité du banditisme ont été souvent le fait, soit des instances en charge de la sécurité des routes, soit des usagers de celles-ci.
Trois types majeurs de sources se sont intéressées à fixer par écrits certains aspects du banditisme à travers diverses périodes de l’histoire du Maroc : il s’agit des récits de voyage, de la production de fatwas (consultation légale) ainsi que des documents d’archives, tant makhzéniens qu’étrangers. Les ressources de la tradition orale devraient être, à ce propos, d’une richesse insoupçonnable, les poèmes chantés, les contes ainsi que les récits divers ayant sans doute été mobilisés pour commémorer ou décrier le bandit local. Toutefois, les ressources orales exigent un programme d’enquêtes et de traitement particulier qui dépasse le cadre de cette note.
Par la rédaction
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